Hommage à un frère disparu – Moussa, je viendrai…


Moussa, je viendrai te voir, lorsque le bruit de la marche résolue des fourmis envahira l’atmosphère de la nuit étoilée de Sédhiou. Je viendrai…là-bas, là où le temps s’est arrêté au coeur du brouhaha d’une ville qui porte fièrement le chaos du stress. Je viendrai, à pas feutrés, pour ne pas réveiller les soupçons de curieux qui veulent se mêler de ce qui les regarde pas. Je viendrai, avec la certitude de te trouver, car là-bas, le temps a cessé d’exister. Pas d’embouteillages, de rendez-vous manqué, de crocs-en-jambe d’escrocs plumant à vif d’honnêtes citoyens, d’hypocrites cachant, sous un faux sourire, leur jeu. Et que dire des traîtres … ?

Je viendrai te trouver dans ton palais tapissé de carreaux d’or massif, aux murs faits de briques en diamants, à l’air parfumé, au beau milieu d’un jardin aux mille fruits et les fenêtres donnant sur les affluents, les océans et les cours d’eau. Je viendrai…là-bas…là-bas… dans un murmure silencieux !

Moussa, il est des souffles dont la brièveté laisse des empreintes indélébiles et profondes que des siècles de vie, sans passion et sans être au service de l’univers et des hommes, ne peuvent égaler.

Mon jeune frère, tu étais de ces étoiles qui ont brillé sur Sédhiou, la Casamance, le Sénégal, voire la sous-région.

Le métier de journalisme était pour toi l’accomplissement d’un sacerdoce. Tu étais le relais des complaintes justes des populations oubliées, la voix des sans-voix, la boussole qui guide un peuple laissé au milieu de nulle part, dans une ignorance totale de ce qu’offre la République, parfois la langue des passions enflammées qui ont fait de la parrêsia leur règle de conduite…

Tu étais un journaliste brillantissime, l’un des meilleurs de sa génération. Celui qui maniait avec dextérité la langue française, le wolof et le mandingue. Un vrai journaliste de radio qui avait le verbe facile et de la presse écrite, à la plume alerte. Tes papiers étaient une invite à cogiter, à s’élever et à espérer. Des éclats de lumière au service de la vérité. Tu n’avais jamais perdu de vue que chaque mot, chaque ponctuation, chaque respiration, étaient un hymne à la responsabilité envers les autres.

Moussa était d’un humanisme intégral. Se mettre au service de l’Homme et de sa communauté, était sa raison d’être. Humble et discret, il avait toujours aidé et faire aider sans bruit, avec, en prime, le sourire, vitrine d’une âme épanouie.

Moussa a parcouru toute la région de Sédhiou, du boudié au pakao, en passant par le diassin, le brassou et le balantacounda, à la recherche de l’information utile. Celle qui rapproche les peuples et cultive le beau jardin du vivre-ensemble. Il était une sorte de pont-jetée reliant les îles où les cœurs célèbrent l’humanisme.

Toute sa vie fut une offrande, un don de soi au service de la communauté, des populations et du Sénégal.

Repose en paix, mon frère !
Bacary Domingo Mané

Bacary Domingo Mané

Vendredi 28 Novembre 2025
Amady Khalilou Diémé

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