La possibilité pour l’actuel chef de l’Etat de briguer un nouveau mandat présidentiel en toute légalité a été ‘’juridiquement’’ actée lors du référendum constitutionnel de 2016, a soutenu M. Fall.
‘’Non seulement, elle n’a pas de valeur juridique mais au plan éthique aussi, considérer que les circonstances ont changé et réexaminer sa position à la lumière d’un nouveau contexte et de données nouvelles procède du courage et de l’éthique’’, a-t-il fait valoir en parlant de la déclaration faite par Macky Sall, lors du référendum de 2016, de ne plus pouvoir être candidat s’il est réélu en 2019.
Le garde des Sceaux prenait part à un débat sur ‘’la candidature du président Macky Sall en 2024’’, à l’initiative de la Task Force républicaine, une instance proche de l’APR, le parti politique du chef de l’Etat.
‘’L’opinion exprimée par le président de la République, quelle que soit sa solennité, ne peut valoir règle de droit dès lors qu’elle ne se traduit pas par un acte législatif’’, a argué Ismaïla Madior Fall.
‘’Cette déclaration en elle-même ne saurait en aucun cas constituer une source de droit’’, a-t-il soutenu en parlant encore des propos tenus par Macky Sall, selon lesquels il est en train d’exercer depuis 2019 le dernier du nombre de mandats que lui autorise la Constitution sénégalaise.
La question de la candidature de l’actuel président de la République a été ‘’déjà tranchée lorsque le président Macky Sall a soumis le projet de révision [de la Constitution] au référendum de 2016’’, a insisté Ismaïla Madior Fall, un agrégé de droit qui a conseillé Macky Sall pour la réforme constitutionnelle de 2016.
‘’Le Conseil constitutionnel a exclu totalement le premier mandat du président de la République en considérant que sous le régime de la Constitution version 2016, le premier mandat du président est celui allant de 2019 à 2024’’, a déclaré M. Fall.
Il affirme, en citant l’article 27 de la Constitution, que ‘’le président de la République est élu pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois’’, et que ‘’nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs’’.
La ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, Aïssata Tall Sall, son collègue chargé des Forces armées, Sidiki Kaba, et d’autres personnalités membres de l’APR ont pris la parole pour défendre la légalité de la candidature de Macky Sall au scrutin présidentiel de 2024.
‘’Nous sommes passionnés par une question politique qui revient de façon épisodique […] Quand nous accédions à l'indépendance, la durée du mandat était de sept ans. Trois ans plus tard, on l’a réduite à quatre ans. Dès 1967, [Léopold Sédar] Senghor l’a fixée à cinq ans. Avec le Code [électoral] consensuel de 1991, Abdou Diouf l’a fixée à sept ans’’, a rappelé le professeur agrégé de droit constitutionnel.
Durant la présidence d’Abdoulaye Wade, la durée du mandat présidentiel a été ramenée à cinq ans, puis à sept ans, a poursuivi Ismaïla Madior Fall.
Ensuite, Macky Sall, élu pour un mandat de sept ans, a fait réduire le mandat présidentiel à cinq ans, sans que cette modification relative à la durée ne s’applique à celui qu’il exerçait lors du référendum de 2016, a rappelé M. Fall.
‘’Je ne me dédis pas’’
Macky Sall, en proposant cette réforme constitutionnelle, avait soutenu que le nombre de mandats présidentiels autorisés par la Constitution ne ferait plus l’objet d’aucune controverse au Sénégal.
Les membres de la Task Force républicaine ont repris le plaidoyer qu’il a récemment fait dans une interview accordée à l’hebdomadaire français L’Express, dans laquelle le leader de l’APR soutient pouvoir légalement présenter sa candidature à l’élection présidentielle de 2024, malgré la promesse qu’il a faite d’éviter toute controverse relative aux mandats présidentiels.
‘’Sur le plan juridique, le débat est tranché depuis longtemps. J’ai été élu en 2012 pour un mandat de sept ans. En 2016, j’ai proposé le passage au quinquennat et suggéré d’appliquer cette réduction à mon mandat en cours’’, a-t-il dit au journal.
‘’Avant de soumettre ce choix au référendum, nous avons consulté le Conseil constitutionnel. Ce dernier a estimé que mon premier mandat était intangible et donc qu’il était hors de portée de la réforme. La question juridique est donc réglée’’, a argué Macky Sall.
Sera-t-il candidat ou pas ? La réponse ne dépend que de lui, a-t-il dit.
‘’Je ne me dédis pas. J’ai donné une opinion qui correspondait à ma conviction du moment. Celle-ci peut évoluer et les circonstances peuvent m’amener à changer de position. Nous sommes en politique’’, a répondu Macky Sall lorsque L’Express a évoqué son livre autobiographique dans lequel il affirme être en train d’exercer son ‘’deuxième et dernier mandat’’ depuis sa réélection en 2019.
Selon Mamadou Kassé, la Task Force républicaine réunit 70 personnes proches du chef de l’Etat.
En 2012, la candidature d’Abdoulaye Wade était contestée par les leaders de l’opposition, dont Macky Sall, qui estimaient qu’elle relevait d’une violation de la Constitution, même si le Conseil constitutionnel l’avait jugée recevable.
La contestation de la candidature du président sortant avait engendré des violences à l’origine de la mort d’environ 12 personnes, selon la société civile.
Depuis plusieurs semaines, l’opposition multiplie les rassemblements au cours desquels elle proteste contre l'éventualité d'une candidature de Macky Sall à l'élection présidentielle de 2024.
Avec APS